Dans les pays anglo-saxons, les certifications professionnelles sont très prisées. Qu’en est-il de ces formations certifiantes dans le domaine de la gestion de projet en France ?
Nous observons que ce marché s’est fortement développé ces dix dernières années. Dans les faits, les éditeurs profitent en France d’une demande soutenue pour ces formations subventionnées (avec les CPF et fonds des OPCA). Ainsi, les éditeurs des certifications et les centres de formation partenaires y ont trouvé une opportunité de croissance facile de leurs activités. Un récent inventaire auprès de 6 éditeurs majeurs (GPM, IPMA, PMI, APM, AACEI, APMG) révèle que près de 80 certifications sont possibles rien qu’en gestion de projet.
Force est de constater qu’un phénomène de dérive commerciale des formations professionnelles s’est installé et nous rapproche du modèle Anglo-Saxon. Que l’on soit consultant ou futur collaborateur en cours de recrutement, il devient indispensable d’afficher des certificats et autres badges pour que son profil soit remarqué ou du moins digne de confiance. Cette dérive en est presque à un stade viral. Plus les consultants et recrues veulent se démarquer, plus ils en demandent ; et plus les clients et employeurs en voient passer et en découvrent de nouveaux, plus ils s’y attachent.
A cet effet purement commercial, d’autres effets s’ajoutent. Le foisonnement des formations certifiantes, basées sur des modèles et cadres de pratiques, touche aussi aux dimensions marketing, cognitive, et reconnaissance des actions de formation professionnelle.
Dimension marketing : Les éditeurs essentiellement à l’international ne se sont pas arrêtés à la promotion d’une offre large de certificats, vecteur de différenciation et de visibilité sur les réseaux professionnels. C’est ainsi que des majors comme ISO, PMI, Axelos, IPMA, APM, Isaca, Open Group, ISC2, et autres éditeurs logiciels font œuvre de créativité, en proposant leur système de fidélisation le plus « addictif ». Comme la validité des certifications est limitée dans le temps, les nouvelles qualifications acquises doivent être maintenues. C’est pour cela que les éditeurs proposent des renouvellements par adhésion annuelle et l’acquisition de PDU* pour certains. Or ces actualisations ne démontrent que le maintien des connaissances. Elles ne proposent rien concernant leur mise en pratique effective.
Plus récemment, vous l’avez peut-être constaté, la nouvelle tendance est aux micro-certifications (micro-credentials). Les éditeurs, sous couvert d’apporter plus de flexibilité aux parcours de formation professionnelle continue, suggèrent de fractionner les programmes longs de formation en développement de compétences. Cela apporte des conséquences : détourner l’effort d’investir le temps nécessaire à l’acquisition d’un corpus complet ou au contraire de pousser à de la consommation compulsive de micro-certifications. C’est un autre travers observé à l’étranger, certains se laissant emporter à cumuler les certifications comme une liste à la Prévert. A se demander quand ces candidats trouvent le temps de les appliquer dans leur travail. C’est un point qui questionne l’intérêt pédagogique de cette forme d’actions de formation au regard des arguments marketing utilisés.
Dimension cognitive : Pour nous Français, le principe de certification des éditeurs anglo-saxon, nous amène toujours à devoir nous focaliser sur la compréhension de l’anglais avant celle des contenus. Même si les formations sont faites en français, l’évaluation par QCM se termine toujours en une séance de bachotage pour réussir l’examen qui accorde la certification. Cet autre point, questionne la réalité de l’acquisition des connaissances (Fondation) et dans une moindre mesure de la capacité à leur mise en pratique (Practionner).
Dimension reconnaissance : Bien souvent, la mise en scène des modalités d’examens est sécurisée par le recours à des organismes tiers de confiance comme CERTyou. Les éditeurs les plus en vue ne laissent aucune place à la fraude, même depuis chez soi. C’est l’argument de crédibilité qu’ils mettent en avant pour nourrir la relation de confiance entre un consultant et son client ou un candidat et son recruteur. Mais en France, contrairement à l’international, nous sélectionnons essentiellement les profils d’après les diplômes issus de la formation initiale. Dans le cadre de la formation continue, les certifications professionnelles restent peu voire non reconnues selon les secteurs d’activités. Est-ce par méconnaissance de ce qu’elles représentent et de ce qu’elles démontrent ou parceque le marché français est critique vis-à-vis des deux biais précédents ?
Aujourd’hui, de plus en plus de voix s’élèvent parmi les personnalités reconnues dans le monde de la Gestion de projet pour dire que le modèle actuel n’est pas adapté. Trop de temps de formation en classe axée sur l’acquisition de connaissances avec des examens qui se concentrent sur les informations apprises et pas assez de temps d’apprentissage en situation de travail. Cela questionne la nécessité de formations étalées dans le temps pour apprendre à résoudre les problèmes lorsqu’ils surviennent. C’est ce que l’on observe presque exclusivement en formation sur les approches Agile.
Source : Pexels
En conclusion, il ne faut donc pas se laisser aveugler par le discours des éditeurs et des centres de formation. Il importe que chacun interroge son projet, challenge ce que l’on attend de l’obtention d’une certification et/ou d’une micro-certification avant de se lancer. Est-ce seulement acquérir un nouveau corpus de connaissance ou faire la démonstration d’une expérience déjà visible sur son CV ? Autrement, il existe d’autres formes plus économiques, modulables et appliquées comme les MOOC ou encore des conférences en ligne. Même si l’investissement temps est plus élevé. La question reste alors de savoir comment sont reconnues les attestations délivrées par les producteurs de ces formations.
*PDU : Professional Development Units. Un PDU est une unité de mesure utilisée pour quantifier les activités de formation et de service professionnel approuvées et correspondent à des blocs temporels d’une heure consacrés à l’apprentissage, à l’enseignement ou au volontariat.
Gartner estime que les budgets des DSI vont baisser de 8% en 2020 par rapport à 2019.
Dans ce contexte, c’est toujours la même sempiternelle question qui revient : comment faire plus quand on a moins d’argent ?
Il n’y a pas de solution miracle
Si la réponse à cette question était si simple, quelqu’un en aurait fait une méthode et serait devenu probablement très riche en très peu de temps.
Pas de solution miracle donc, mais peut-être des pistes de solutions à chercher dans les modes de fonctionnement de certaines équipes.
Première piste : dépenser moins.
Maigrir : lean, lean, lean…
Il s’agit ici d’optimiser les processus, de standardiser et d’automatiser au maximum pour réduire les coûts. L’approche Lean et ses dérivés dans l’industrie, l’IT ou le Management contient tout un tas de méthodes pour arriver à cet objectif. Cet article à ce sujet est très intéressant : “Sorry, But Lean Is About Cost Reduction…” et identifie certaines pistes :
Eliminer les gaspillages (c’est ce qui est le plus connu dans Lean et parfois on s’arrête là).
Analyser et catégoriser les coûts et s’attaquer aux coûts non justifiés
Rationaliser les activités
Supprimer des postes (mais pas les personnes que l’on emploiera à travailler sur le système)
… Oui mais pas n’importe comment !
Vous noterez que cet article au titre provocateur insiste finalement sur le fait que l’approche Lean n’a pas pour seul but de réduire les coûts, mais permet de le faire si on l’adresse de manière globale et intelligente.
Sur ce point, considérer qu’il est possible de réduire les coûts en supprimant des postes et en demandant toujours plus aux employés a peu de chance d’être rentable. Les coûts cachés ne sont pas loin : augmentation du turnover, de l’absentéisme, désengagement.
Par exemple, cette étude montre qu’une implémentation d’une approche Lean qui ne serait centrée que sur les aspects méthodologiques au détriment des aspects humains peut conduire à une augmentation de 82% du nombre d’arrêts maladie et de 62% de leur fréquence moyenne. En effet, une culture du process à outrance peut conduire à une diminution de l’autonomie et du contenu cognitif du travail, deux facteurs jouant sur la motivation intrinsèque du travailleur comme nous le rappelle Dan Pink dans cette vidéo “la vérité sur ce qui nous motive”.
Simplifier
Vous connaissez les 4 valeurs du Manifeste Agile ? Normalement oui.
Vous connaissez les 12 principes sous-jacents ? Moins sûr n’est-ce pas ?
Je les relisais récemment et l’un d’entre eux me semble totalement aligné avec le thème de cet article : La simplicité – c’est-à-dire l’art de minimiser la quantité de travail inutile – est essentielle.
Apprendre à faire simple pour travailler moins et donc dépenser moins, vous en avez forcément entendu parler.
Innovation frugale vous connaissez ? Allez lire cet article où Navi Radjou nous dit :
“L’objectif est également de faire des produits simples, robustes et durables. Et d’aller vite.”
Qu’est-ce qui nous empêche de faire pareil dans la DSI ?
Planifier juste à temps et pas tout le temps : roadmap produit, sprint planning, et basta !
Estimer par comparaison plutôt que chiffrer : j’ai réussi un jour à réduire à 45 minutes une session d’estimation d’une équipe de 8 personnes qui durait d’habitude 1 journée entière, et qu’ils réalisaient une fois par mois. Je vous laisse faire le calcul des économies réalisées. De mon côté les remerciements des participants de ne plus avoir à subir cette journée infernale m’ont suffit.
CoProj, coPil, CoStrat, ComInvest, etc… Privilégiez la transparence et la visibilité à froid (emails, supports de communication) et ne participez à des comités que si des décisions importantes sont à prendre. Sinon traitez les petites décisions en point à point.
Développeurs, écoutez Uncle Bob et codez proprement avec Clean Code : Keep it simply stupid !
Antoine de Saint-Exupéry annonçait d’ailleurs le Lean et l’Agilité avant l’heure :
La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer.
Investir
Comment ? Dépenser moins en investissant ? Mais qu’est-ce qu’il raconte ?
Et pourtant : investir au début et régulièrement permet d’économiser sur la durée.
Pas le temps d’industrialiser les tests, il faut qu’on produise de la valeur, c’est notre PO qui l’a dit.
Expliquez donc à votre PO que produire du code sans automatiser les tests aujourd’hui est plus rapide et moins coûteux, mais qu’il est probable qu’il devra repayer une toute nouvelle application dans 3 ans quand celle-ci sera impossible à maintenir.
Nous pouvons regrouper toutes ces pratiques d’automatisation (des tests, des déploiements, de l’infrastructure) sous le terme chapeau de DevOps (je préfère parler de BizDevOps). Ces pratiques et outils nous servent à faire des économies :
moins d’évaluation et de gestion des risques en amont car on teste plus tôt et on obtient rapidement les feedback des utilisateurs
moins de charges de recette manuelle qui ont tendance à augmenter de manière exponentielle avec le temps
moins de temps perdu à bricoler parce qu’on n’a pas à disposition les bonnes données ou l’environnement pour les tests de performances (coucou Infrastructure as code)
Sans oublier que BizDevOps, c’est avant tout un mode de fonctionnement qui favorise les interactions et la collaboration. Qui n’a jamais entendu une phrase du type : « Mon job c’est développeur, …peu importe ce qui arrive …je développe » ? Phrase qui annonce de bien mauvaises nouvelles dans quelques sprints…
Deuxième piste : produire plus de valeur
Prioriser
Cela fait plus de 10 ans que je travaille autour de l’agilité. Ce qui m’avait passionné dès le début, au-delà de l’amélioration des interactions et des relations humaines qui en découlent, c’est la priorisation par la valeur. Je ne sais pas combien j’ai fait d’ateliers avec des Product Owners (PO) pour les aider à appliquer ce principe si simple à énoncer, si difficile à mettre en œuvre.
Évidemment, aujourd’hui tout le monde est d’accord sur le principe de faire d’abord ce qui a le plus de valeur. Il y a 10 ou 20 ans, ce n’était pas si naturel, puisque de toute façon il fallait tout faire, alors pourquoi ne pas commencer par le plus facile, ou le plus difficile…
Avec mon équipe de coachs agiles, nous avons créé une école pour les PO d’une grande entreprise leader du e-commerce. Nous avons dédié un module entier d’½ journée à la valeur. Pas à la priorisation, mais à la représentation de la valeur. Car c’est un travail qui peut être extrêmement complexe. Il consiste à identifier les drivers ayant un impact sur la valeur et à les catégoriser : risques, valeur intrinsèque, valeur d’investissement, technologies…
En travaillant sur la priorisation du backlog, le processus de développement en agile permet donc, pour un coût constant, de livrer en premier des fonctionnalités qui génèrent plus de valeur.
Alistair Cockburn nous propose d’ailleurs la définition suivante :
“Agile is early delivery of Value and less bureaucracy”
Comprendre et mesurer
Pour produire plus de valeur, il faut probablement développer sa compréhension des utilisateurs et des clients.
Et pour aller plus loin que cette simple phrase, j’aime beaucoup la combinaison des 3 approches Design Thinking + Lean Startup + Agile :
Design Thinking ou l’approche centrée utilisateur vise à se mettre à la place du client/utilisateur pour bien comprendre quels sont ses problèmes.
Lean Startup permet de poser des hypothèses sur les solutions à mettre en oeuvre en face de ses problèmes, et de boucler très vite pour savoir si nos hypothèses sont bonnes, ou pas.
Le développement Agile permet d’organiser le processus de livraison des fonctionnalités de sorte que ce soit régulier (itératif) et incrémental en priorisant par la valeur (comme vu précédemment).
Si même le Gartner le dit…
La combinaison de ces 3 approches est pour moi indispensable dans la réussite d’un produit car on peut très facilement en arriver à développer vite et bien des fonctionnalités parfaitement inutiles. J’intègre tout cela dans tous mes accompagnements pour product owners et product managers.
Au final : lean et agile, la solution ?
Ce qui définit l’Agilité, c’est cette importance donnée à l’apport de valeur plus qu’à la réduction des coûts. Il y a bien sûr une recherche d’efficacité, mais surtout d’efficience.
Avec plusieurs années d’expérience derrière moi, une combinaison des 2 est probablement une bonne approche : optimiser au maximum ce qui va être répétitif (tests, déploiements…) et accélérer au maximum le processus de création de valeur (priorisation, less is more…).
Comme dans un bon cocktail, tout est question de dosage et de vision globale : pour avoir un système efficient, il se peut que certaines parties du système ne soient pas optimisées au maximum, générant de fait une capacité à innover et à créer plus de valeur.
Pour arriver à trouver ce bon dosage permettant de produire plus de valeur, plus vite et avec moins d’argent, vous avez probablement besoin d’une bonne équipe produit qui :
Comprend les problèmes réels de ses clients (avec un profil UX par exemple dans l’équipe)
Expérimente fréquemment des morceaux de solutions pour mieux comprendre son écosystème et valider ses hypothèses (avec le Lean Startup). Cela implique de systématiquement mesurer a posteriori de la livraison les indicateurs liés à ces hypothèses, chose qu’on a parfois tendance à oublier de faire
Développe son produit avec des principes agiles : en favorisant les interactions, en livrant fréquemment des fonctionnalités en production, en documentant le nécessaire et en étant ouvert à des changements fréquents (vous avez reconnu les 4 valeurs du Manifeste Agile ?)
Met en place un système de mesure de la performance et s’organise pour l’améliorer en continu (avec le Lean). Je me permets d’insister sur ce dernier point : la mise en place d’une véritable démarche d’amélioration continue est la base de l’optimisation d’un système. C’est également ce qui fait trop souvent défaut dans les implémentations Agiles qui prennent insuffisamment en compte le changement de mindset nécessaire
J’ai observé personnellement une équipe de 6 personnes (PO, UX, devs) produire en 6 semaines ce qu’une équipe de 12 n’avait pas réussi à finaliser en 6 mois.
Leur différence ? Probablement un peu plus d’expérience (et donc un TJM plus élevé coucou les fausses économies) et surtout une capacité à se poser les bonnes questions.
Rappelez-vous A. Einstein qui disait :
“Si j’avais une heure pour sauver le monde, je passerais 55 minutes à définir le problème et cinq minutes à trouver la solution.”
Attention je le répète : ceci n’est pas une solution miracle. Ca ne fonctionnera pas si votre organisation n’est pas collaborative, si vos métiers et vos IT ne savent pas se parler, si votre management met des bâtons dans les roues plutôt que d’aider les équipes de dev. Mais si vous prenez maintenant ce chemin, ce sera toujours mieux que la situation actuelle. C’est dans les situations de crise que l’Homme est le plus innovant.
Une entreprise leader du e-commerce fait face à une croissance très rapide de ses effectifs. Une réorganisation des équipes vers un recentrage sur le métier et les clients est nécessaire pour gagner en agilité et réactivité, mais aussi pour favoriser l’innovation.
Un « Head of Product » est nommé, qui a pour objectif de mettre en place 50 équipes produit en 18 mois.
Solution
Cadrage et mise en œuvre de la transformation de l’organisation :
Formalisation des apports de la nouvelle organisation
Découpage du programme en 20 chantiers
Identification des directions pilotes et initialisation du plan de transformation
Accompagnement sur la communication : prises de paroles de membres du COMEX, réalisation de contenus (réseaux sociaux, vidéos…)
Conception et animation d’une « Ecole du PO » visant à former les Product Owners
Conception et animation d’une formation sur le Leadership Agile à destination des managers
Mise en place dans les équipes d’un système de mesure de la performance basé sur les Objective Key Results (OKR)
Accompagnement de la direction de la transformation pour identifier les impacts de la nouvelle organisation sur l’existant
Bénéfices
Forte autonomie et sentiment d’appartenance dans les équipes produits
Les PO deviennent des chefs d’entreprises
Rythme de livraison des incréments de valeur accéléré
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Dans le cadre de sa transformation, Claranet souhaite acculturer ses référents produits à la culture produit et développer ses pratiques de product management avancées. De par la grande variété des produits adressés par Claranet, les pratiques abordées devront autant couvrir les thématiques de discover que que build tout en permettant une projection sur les problématiques terrains concrètes rencontrées par les équipes.
Solutions
Après une phase de personnalisation de parcours, avec l’équipe Portfolio, en charge du catalogue de produits Claranet. Un parcours de formation de 7 modules renforcés de 3 open spaces dédiés à des cas pratiques d’application terrain, est déployé sur 4 mois.
Bénéfices
Des référents forts capables de retranscrire et d’infuser la culture produit dans l’organisation
Des outils précis et de référence adaptés à chaque contexte
Résolution de problématiques terrains & facilitation à l’émergence de nouveaux produits innovants
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Si plusieurs méthodes existent pour faire le tri parmi les besoins fonctionnels, seul le modèle de Kano tient compte de la satisfaction client. Comment en tirer ? Réponse, exemple à l’appui.
Sur le podium des buzzwords, l’agilité se partage la première marche avec la « transformation digitale ». Et pour cause : l’impératif de réduction du « time-to-market » appelle une gestion de projet rapide et efficace, agile donc. Pour y parvenir, encore faut-il savoir trier et prioriser les besoins fonctionnels. Pas si simple : entre la crainte de voir un concurrent débarquer à tout moment et celle de voir son service boudé par les utilisateurs, la tentation est grande de courir après plusieurs lièvres à la fois.
Pour limiter ces risques, plusieurs solutions sont à disposition :
La Méthode de Moscow : Elle propose de noter les priorités du backlog en faisant intervenir les parties prenantes mais sans stratégie de satisfaction client. Pour plus d’information, allez voir: PRIORISER, MÉTHODE 1 : MOSCOW
La Story map : Avec elle, les fonctionnalités sont classées selon deux axes : le parcours utilisateur sur l’axe horizontal et la priorité des User Stories sur l’axe vertical. Ici encore, aucun lien n’est établi avec des critères de satisfaction client.
Le Modèle de Kano : Comme son nom le laisse entendre, il s’appuie sur le diagramme de Kano qui a pour finalité d’évaluer la satisfaction client. Cet outil a été inventé par le Dr Noriaki Kano en 1984. Conférencier, écrivain et surtout consultant dans le domaine du management de la qualité, au Japon. Il est actuellement professeur émérite de l’Université des sciences de Tokyo.
Si ces 3 solutions permettent une priorisation, une seule – celle qui s’appuie sur le modèle de Kano – tient donc compte de la satisfaction client
Dissocier satisfaction et non-satisfaction
L’objectif du modèle est de prendre en compte les retours des utilisateurs du produit et/ou du service pour modéliser la satisfaction client sur un diagramme. L’approche réside dans la dissociation de la satisfaction et de la non-satisfaction au regard de la présence ou pas de la fonctionnalité attendue par le client. La satisfaction client est une clé majeure aujourd’hui, qui rend le client fidèle et est donc un pilier de rentabilité important. Le modèle de Kano présente l’intérêt de se décliner sur les différentes phases.
Pré-développement : L’équipe marketing peut utiliser ce modèle pour cibler le marché commercial et analyser les chances de réussite du produit – plus la satisfaction client est élevée plus les chances de réussite sont grandes. Le modèle permettrait de faire apparaître les caractéristiques fortes dans une perspective de succès du produit.
En cours de développement : le responsable projet, le Product Owner dans le cas d’un projet en méthode Agile, manage la priorisation des fonctionnalités livrées en se basant sur la satisfaction client. Ce qui permet de livrer, dans le cas de sprint, les fonctionnalités de la plus haute valeur business dès que possible.
En post-production : des évolutions pourraient être valorisées (ou non) par ce modèle. Une étude de marché pourra aussi utiliser ce modèle pour assurer la pérennité du produit.
Concrètement voici le diagramme qui porte le modèle de Kano :
Pour construire le modèle, un questionnaire recueille, pour chaque fonctionnalité, le niveau de satisfaction de l’interviewé. La méthode consiste à évaluer successivement la satisfaction en présence et en l’absence de la fonction. Mais le modèle va bien plus loin en modélisant 3 groupes principaux sur la courbe de Kano :
Les attentes de base : généralement non exprimées, elles représentent les attentes que les fournisseurs doivent impérativement satisfaire pour rester sur le marché. Priorité Haute.
Les attentes proportionnelles : la satisfaction augmente avec le niveau de performance délivré par la fonction. Priorité Basse.
Les attentes attractives : le fournisseur surprend son client avec une fonctionnalité à valeur ajoutée qu’il n’attendait pas. Les fonctions vont au-delà des attentes client. Un terrain propice à l’innovation. Néanmoins leur absence se solde par une frustration client. Priorité Moyenne.
Les bénéfices du modèle de Kano dans la pratique
Dans la pratique, la méthode de Kano apporte donc plusieurs atouts :
Elle contribue à évaluer les attentes des clients grâce au niveau de satisfaction associé.
Elle suscite une rencontre avec les clients pour les écouter et améliorer ainsi la compréhension des attentes
Elle aide à trier et prioriser les fonctionnalités à développer
Elle facilite l’évaluation des produits innovants.
Elle augmente la fidélité des clients, un client non satisfait cherchera tôt ou tard le même service chez la concurrence. L’objectif est de la satisfaire avant qu’il parte.
Un impératif : bien structurer les questionnaires
Pour l’exécuter, il est capital de bien mener les questionnaires. Voici un exemple – avec des réponses arbitraires à des fins d’illustration.
Si votre téléphone portable possède les apps des réseaux sociaux dès son premier démarrage (Facebook, Twitter, LinkedIn, …) : a. cela vous plait beaucoup b. cela vous intéresse c. vous trouvez ça normal d. vous vous en contentez e. cela vous déplaît
Si votre téléphone permet de joindre vos amis en faisant un appel téléphonique classique a. cela vous plait beaucoup b. cela vous intéresse c. vous trouvez ça normal d. vous vous en contentez e. cela vous déplaît
Si votre téléphone n’a que 5 sonneries différentes (cela est transformé en une fonctionnalité manquante, telle que « choix de 50 sonneries » ) a. cela vous plait beaucoup b. cela vous intéresse c. vous trouvez ça normal d. vous vous en contentez e. cela vous déplaît
Si votre téléphone présente un écran 4k a. cela vous plait beaucoup b. cela vous intéresse c. vous trouvez ça normal d. vous vous en contentez e. cela vous déplaît
En appliquant ici le modèle de Kano, nous obtenons donc les catégories de priorités suivantes :
Fonctionnalité « réseaux sociaux » : elle figure dans le groupe rouge et fait donc partie des attentes attractives : c’est une priorité moyenne, cette fonctionnalité devrait être présente.
Fonctionnalité « pouvoir joindre ses amis » : dans le groupe vert, elle représente une attente de base et une priorité haute.
Fonctionnalité « peu de sonneries » : sans incidence réelle car attente proportionnelle, sûrement une fonctionnalité à améliorer dans le futur, priorité basse.
Fonctionnalité « écran 4k » : de même, cependant la décision de l’inclure ou pas dépend aussi du coût associé. Il faudrait étudier les risques de cet investissement. Priorité basse.
Récapitulatif des fonctionnalités priorisées :
Pouvoir joindre ses amis
priorité haute
Applications “réseaux sociaux” déjà installées
priorité moyenne
5 sonneries disponibles
priorité basse
écran 4k
priorité basse
Inspiré ? A vous d’appliquer le modèle de Kano sur vos propres projets.
Vous gérez un produit : apprenez à prioriser et à mesurer la valeur de votre produit !
Comment choisir entre développer un « bot de messagerie » sur votre application ou bien un nouvel onglet ? Peut-on mesurer en amont la valeur de ces fonctionnalités ? Quelles sont les approches pour calculer, voire traduire cette valeur en € ?
Voilà les problématiques auxquelles font face les Product owner pour qui les métriques sont devenues une obsession.
Nous allons aborder les concepts et les outils à maitriser pour y arriver, accrochez-vous, c’est parti !
Prioriser, méthode 1 : Moscow
Ci-dessus un exemple d’application de la méthode MOSCOW sur le sprint backlog d’un site de vente quelconque.
La première approche qui se veut pragmatique n’est jamais très loin de la méthode MoSCoW (Must have, Should have, Could Have et Won’t Have). On affecte un niveau de priorité aux « actifs / features / fonctionnalités* » que l’on veut intégrer au produit. Pour le faire bien, on essaie de le faire souvent, en travaillant uniquement ce qui est le plus prioritaire. * pour un produit qui n’est pas informatique ou qui comporte des contenus sans développements (vidéos, …), on pourra parler d’actif ou de feature
Par exemple, imaginons que vous ayez 3 mois pour développer un site de vente, comment s’y prendre ?
On liste l’ensemble des grandes fonctionnalités : accéder au catalogue de produits, visualiser l’historique des achats, acheter, etc …
On assigne une priorité à chacune
Les Must have : acheter, accéder au catalogue de produits
Nice to have : accéder à l’historique de ses achats…
Le planning reste clair : les « must have » seront développés en premier et les « nice to have » restants, etc … si jamais il nous reste du temps !
Prioriser, méthode 2 : orientée données
La seconde, orientée données, s’inscrit une démarche Lean Startup (Build, Measure, Learn).
Ci-dessus un exemple d’application orientée données sur le développement de facebook connect pour un site de vente quelconque.
Facebook Connect est un module social externe ousocial loginpermettant à un site web de proposer à ses visiteurs d’utiliser leur compte Facebook pour s’identifier sur le site visité. On fait des hypothèses basées sur notre compréhension du marché, on mesure notre adéquation et on apprend de ses choix. Pour le faire bien, on met en place des standards de calcul, on identifie au préalable les métriques à suivre pour un actif donné et on les suit. La dernière étape permet de savoir dans quelle mesure valider ou invalider ses choix. Dans notre exemple ici, on estime que la valeur (ou BV : « Business Value ») de développer Facebook Connect pour que nos visiteurs s’identifient sur notre site de vente est de 10 000€ par jour. Une fois la fonctionnalité priorisée/développée, on suit notamment le taux de conversion : pourquoi n’atteint-il pas les 20% d’augmentation estimés ? Le taux d’abandon en page d’identification a lui fortement diminué, le taux d’abandon sur une autre page a t il augmenté ? Où ? … A mi-chemin entre les 2 approches ? Toutes les méthodes de priorisation/mesure que l’on appellera « par scoring ».
Ce n’est pas indispensable d’être orienté données
Tout d’abord, la force de l’approche orientée données réside dans sa capacité à adresser des problématiques business globales et complexes. C’est donc dans ce type d’environnements (où la connaissance des usages est particulièrement importante) qu’elle prend tout son sens, ce n’est peut-être pas le cas de votre environnement… La deuxième variable est temporelle, il faut savoir qu’un produit suit un cycle de vie :
Tant qu’il n’a pas atteint sa forme minimale viable, ça n’a peu/pas de sens de chercher à valoriser les actifs qui le composent. Le MVP est par définition le premier ensemble qui constitue le produit que l’on peut valoriser et le produit finit sa vie lorsqu’on ne peut plus le valoriser.
Enfin la dernière composante est le rapport à la concurrence. « Combien va me rapporter tel service ? Telle feature ? Quel est la « business value » de passer maintenant sur telle technologie ? Ou au contraire, combien est ce que ça va me couter de ne pas faire cette migration pendant 1 an ? » Ce sont des questions qu’il est d’autant plus naturel de se poser que la capacité d’une entreprise à mettre sur le marché très rapidement un produit ou une nouvelle version est devenu un facteur concurrentiel à part entière. L’approche garantit des retours fréquents et qualitatifs permettant de s’adapter d’autant mieux dans ce type de contexte.
Quels sont les outils pour calculer la valeur d’une fonctionnalité de son produit ?
La valeur « business » représente ce que vaut une fonctionnalité ou un service en embrassant tous les aspects qui font sa force. Par défaut il ne faut pas perdre de vue qu’il y aura toujours certains aspects qui seront mal appréhendés par ces méthodes : comme la valeur qui est créée lorsque des utilisateurs interagissent avec notre contenu ou alors la « prime au premier » que l’on obtient à délivrer un service qui n’existait pas auparavant… L’important est donc de savoir que cette mesure ne se substitue pas à l’intuition et d’utiliser des métriques de calculs comparables pour chacun de vos actifs :
Pour une fonctionnalité ou un service qui est supposé générer des revenus ou une réduction de couts, c’est bien ce que l’on cherchera à estimer pour calculer un ROI (cf. 2nde image)
Idem pour un actif qui contribue à ce qu’un autre rapporte : si un actif ne peut fonctionner sans un autre, c’est que cet actif contribue à la valeur générée : Imaginons (si on reprend notre exemple) que le développement de FB Connect pour notre site de vente nécessite le développement d’une autre fonctionnalité ou d’un autre actif. On parlera alors d’un « enabler » et il s’agira d’estimer dans quelles proportions il contribue à notre hypothèse d’augmentation de BV portant sur l’augmentation de taux de conversion (et potentiellement à d’autres) pour en estimer la valeur.
Pour d’autres fonctionnalités, services ou contenus, liés à une échéance, comme une amende réglementaire (Hello GDPR) ou un spot publicitaire, on estimera à l’inverse ce que cela nous coute de ne pas faire, on appelle ça le cout du délai :
Exemple d’application du coût du délai sur 2 contenus comparables
Quantifier la valeur d’une feature n’a pas de sens si l’on ne suit pas les résultats …
L’AB Testing ou Split Testing est un bel exemple d’utilisation bout en bout de la donnée. Le procédé est notamment poussé par de nombreux designers pour affiner leurs choix et leur compréhension des usages. Il s’agit de tester plusieurs variantes d’un même élément directement face à des utilisateurs : les utilisateurs sont renvoyés aléatoirement vers chacune des variantes pendant un temps donné. On garde à la fin la meilleure variante : celle qui a les meilleurs taux de conversion, de transformation ou n’importe quelle métrique que vous voulez améliorer.
Exemple d’AB Testing sur une page web
A ce jeu, les principaux leaders sur des services numériques excellent (75 % des sites ayant un trafic supérieur à 1 million de visiteurs font de l’A/B Testing). Au-delà d’optimiser la décision, le procédé permet d’en apprendre plus sur ses visiteurs et ce qui fonctionne, d’en connaitre finalement plus sur la « capitalisation » vue de l’utilisateur de son produit. Même si l’on n’est pas dans une logique d’AB Testing, lorsque l’on déploie une fonctionnalité ou un service, il faut suivre :
l’impact sur les métriques identifiées auparavant, on cherche les « tendances »
l’écart avec ses hypothèses, cela permet de se poser les bonnes questions et de tirer les bons enseignements au moment de refaire des hypothèses
l’évolution de la valeur des différents actifs qui composent le produit,
C’est tout l’intérêt de l’approche qui en dépend… Pour finir, il faut garder en tête que cette démarche orientée données est intéressante parce qu’elle pousse à la réflexion autour de vous, améliorant ainsi votre compréhension du marché et celle de vos équipes. Pour autant, nous travaillons tous dans des organisations dont la valeur générée ne correspond pas à la somme des valeurs individuelles de ses produits. Contribuer à, collaborer avec d’autres équipes vous mèneront parfois à faire des choix qui ne favorisent pas la valeur de son produit, ce sont pourtant souvent de bons choix !